lundi 2 mars 2009

de la chambre d'hôtel (suite)

de la chambre au lit, à peine un pas, ôter ses chaussures, sans fioriture, laisser glisser sac et manteau à terre et tater du moelleux du sommier en tombant de sa hauteur, apprécier la dureté apparente ou bien la mollesse sirupeuse, je cherche l'oreiller, important l'oreiller, déterminant pour le début de nuit, pour le sommeil aussi, le bloque sous ma nuque si trop ferme si trop creux, je cherche déjà le deuxième , voire celui de l'armoire, faire mon nid, coucou voyageur, arrache le drap coincé au cordeau sous le matelas, façon légion étrangère, j'ai horreur des lits trop bien faits, des draps glacés sans un pli, j'aime le desordre des lits des lendemains, le froissé de la nuit, l'infime parfum du corps qui s'est tourné et retourné par trop de chaleur ou de solitude ou de débordements, le voile de sueur sous la taie, les cheveux effilochés qui griffent la blancheur du lit, mais avant le matin, le lit garde la trace de la rigueur ménagère et la couverture caramel accepte difficilement de se laisser plisser, encore tendue, tirée impéccable et rèche , pas facile à amadouer la laineuse, je démonte, démantèle, tiraille de chaque côté, mais seul le corps de la nuit la vainc, anéantit la raideur feutrée, la couverture ne cache plus au petit matin l'anonymat du non lieu, elle découvre le reste d'humanité d'une femme déjà debout, sous la douche jamais assez chaude
Julia Billet

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