samedi 28 février 2009

la chambre d'hôtel

1er ou 2ème étage, je prèfère monter à pieds, couloir en enfilade, portes où s'inscrivent en lettres dorées (ou noires) un numéro, encore plus loin, hésiter, compter 28, 29, la 35 est juste après l'angle du couloir, glisser la clé, la clé n'entre jamais dès la première fois, il faut forcer un peu, tenter l'autre sens, quand elle s'enfonce enfin, je peux tourner, pousser la porte 35,(ou 23 ou 36) chercher la lumière à main droite, appuyer sur l'interrupteur, être surprise comme à chaque fois par l'intensité de la lumière crue, éviter le miroir juste après la salle de bain, le lit, inévitable lui, en plein milieu, le bureau, la chaise, le rebord de fenêtre, les deux appliques murales, au dessus de la tête de lit, la moquette rasée, la douche carrelée de blanc, les trois serviettes impeccablement pliées sur le porte-serviettes, le repose-valise, la télévision, sa télécommande sur la table de nuit, l'oreiller supplémentaire dans l'armoire ouverte, posé sur la couverture caramel, cette chambre là, comme toutes les autres, tellement comme les autres, un non lieu, un lieu absent à lui même, dupliqué en mille autre lieux, clooné jusqu'à ne plus exister en tant que tel. Une nuit, ou plusieurs nuits dans cette chambre, absorbe l'idée même du lieu, dormir revient à être nulle part, dans un entre deux solitaire où le couvre lit gaufré beige couvre le drap rèche, engoncé, tiré sans un pli par dessus une couverture laineuse, se glisser entre ces draps, forcer le passage pour ne pas rester étrangère à ce lit là, froid et raide, je froisse les tissus, tourne et retourne les deux oreillers que je pose l'un sur l'autre, j'ai un tour d'avance, je sais déjà tout de cette chambre , je l'ai rencontrée des dizaines de fois, je connais ce sentiment d'être personne dans une chambre de nulle part, j'ai tant de fois déjà cherché ma place dans cet espace, cette île au milieu de rien, plantée à l'identique, comme les rangées de pins dans les Landes; nuit à demi -éveillée pour ne pas perdre le nom, la part de l'ombre, juste assez endormie pour ne plus savoir où je suis, là ou ailleurs, regretter de ne pas avoir entrouvert la fenêtre, je me lève, l'ouvre, trop chaud, le radiateur est à fonds, impossible de baisser la température, reviens me coucher, pense et me retourne, je ne sais bientôt plus où je suis ni pourquoi ni comment, être ici et nulle part ailleurs, pour cette nuit, et une autre encore, m'apaiser de ne pas être quelque part, de ne rien devoir, d'être seule avec moi, là, dans un lieu qui n'existe pas

1 commentaire:

  1. ...et le bonheur, pour moi, de te suivre dans ce nulle part pour tâcher, à mon tour, de creuser ma place, quelque part, dans un lieu qu'il faudra faire exister.
    DR

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